« Je vais m’en sortir. »

Rena

Mère de trois enfants et coordonnatrice de services de placement en foyer d’accueil, Rena a appris, à l’âge de 58 ans, qu’elle vivait depuis toujours avec une malformation cardiaque – une bicuspidie aortique. Elle a raconté son expérience à Une voix aux maladies valvulaires Canada qui démontre comment sa détermination et son positivisme l’ont aidée à s’en sortir.

Quels étaient vos symptômes?Je me souviens de deux épisodes de symptômes.

La première fois, j’avais 12 ou 13 ans : je suis sortie de la douche pour dire à ma mère que j’allais m’évanouir, puis je suis tombée sans connaissance. Nous croyions que j’avais eu trop chaud dans la douche.

La deuxième fois, des années plus tard, je visitais mes enfants – qui avaient grandi et quitté la maison : lors d’une partie de golf miniature, par une journée très chaude, je me suis sentie essoufflée, puis étourdie. Mon fils m’a agrippée par le bras pour m’asseoir et est allé me chercher de l’eau froide. Après un moment, j’allais mieux.

Qu’est-ce qui a mené à votre diagnostic de maladie valvulaire?

J’ai eu un troisième épisode à 58 ans. Encore une fois, je sortais d’une douche chaude. Mon cœur s’est mis à battre très fort, et j’avais l’impression que mon cerveau manquait d’oxygène.

Je me suis allongée sur le plancher avec mon peignoir : je ne voulais pas me blesser en m’évanouissant. Les symptômes ont fini par passer, mais ils ont persisté assez longtemps pour me faire très peur. Par un heureux hasard, j’avais mon rendez-vous de suivi annuel avec ma médecin cette journée-là. Quelle chance!

Lorsque je lui ai raconté ce qu’il m’était arrivé, elle a ausculté mon cœur. Elle m’a dit : « Vous avez un important souffle cardiaque que je n’ai jamais entendu auparavant. » Elle m’a envoyée voir un cardiologue.

Après un échocardiogramme, celui-ci m’a annoncé que j’avais une maladie cardiaque congénitale. Le nom m’a fait rire, et j’ai demandé ce que ça voulait dire :

« Vous êtes née avec une bicuspidie aortique, m’a-t-il expliqué. Normalement, la valve aortique du cœur ressemble à une tarte taillée en trois pointes : la vôtre n’en a que deux. » Ainsi, le sang avait moins d’espace pour passer, et le tissu valvulaire était moins flexible (calcifié).

Avez-vous des antécédents familiaux de bicuspidie aortique?

Mon père était diabétique et avait un problème cardiaque, mais il n’avait pas une malformation comme la mienne. Après avoir reçu mon diagnostic, j’ai appris que mon grand-père maternel était décédé deux semaines avant la naissance de ma mère. Aurait-ce été des suites d’une valve bicuspide? On ne le saura jamais.

Quel traitement vous a-t-on recommandé?

Le cardiologue m’a dit que l’intervention chirurgicale n’était pas urgente. « Nous allons vous suivre, a-t-il ajouté. » Il m’a demandé de surveiller la manifestation de symptômes comme ceux que j’avais eus : un battement cardiaque fort et une impression de manque d’oxygène.

Je passais un échocardiogramme tous les ans; et, pendant six ans, tout allait bien. (Le fait que j’ai arrêté de prendre de longues douches chaudes a peut-être aidé!)

Comment avez-vous su que ça n’allait plus?

J’ai commencé à ressentir certains symptômes. Mon cœur se mettait à battre fort, puis mon cerveau s’embrumait – comme si mon cerveau manquait d’oxygène. J’ai appelé mon cardiologue.

Il a été stupéfait de constater à quel point l’ouverture de ma valve avait rétréci et le tissu valvulaire s’était calcifié depuis ma dernière visite. Mot pour mot, il m’a dit : « Il faut vous opérer, maintenant. »

Ce à quoi j’ai répondu : « Je ne peux pas : je pars en croisière. »

J’étais démoralisée – une chirurgie à cœur ouvert me paraissait terrifiante. À l’époque, la chirurgie non effractive n’était pas aussi largement répandue qu’aujourd’hui. Mon partenaire et mes enfants m’ont raisonnée et convaincue de subir l’opération.

J’ai appelé le médecin et je lui ai dit : « Je suppose que je n’irai pas en croisière. » « J’attends justement votre appel, a-t-il répondu. »

Quelle valve de remplacement vous a-t-on recommandée?

On m’a dit qu’avec une valve mécanique, je devrais prendre des anticoagulants. Comme le taux de plaquettes dans mon sang était déjà bas, ces médicaments augmenteraient mon risque d’hémorragie. Alors, mon chirurgien croyait qu’une valve biologique (bioprothèse) serait mieux pour moi. J’étais d’accord : c’était la meilleure option pour ma situation.

Que s’est-il passé ensuite?

En juillet 2012, quelques semaines avant mon angiographie préopératoire, on avait organisé une fête pour célébrer les 75 ans de mon partenaire.

Pour l’occasion, j’ai voulu une pédicure et une coiffure. Au salon d’esthétique, dès que j’ai plongé mes pieds dans le bassin d’eau chaude, j’ai été frappée par une nouvelle vague de symptômes. Je suis rentrée chez moi bredouille, et j’ai pleuré.

Je ne sais toujours pas comment j’ai réussi à tenir pendant la fête. Je souriais comme si de rien n’était. Personne ne s’est rendu compte de quoi que ce soit.

Le lendemain, en route vers le travail pour demander un congé maladie, j’ai eu un autre épisode, et j’ai dû arrêter la voiture sur le bord de la route. Mon partenaire est venu me chercher et m’a immédiatement conduite au service des urgences.

J’ai expliqué que j’avais besoin d’une chirurgie à cœur ouvert, pour laquelle une angiographie était planifiée à cet hôpital. L’examen n’a rien révélé d’anormal. Aucune artère n’était bloquée : ce n’était pas une crise cardiaque. La médecin traitante m’a dit que je pouvais rentrer chez moi.

Je lui ai répondu d’une voix ferme : « Je ne retournerai pas chez moi. »

Elle m’a regardé d’un air ébahi. Ce n’était pas dans mes habitudes de me braquer comme ça, mais j’étais terrifiée. J’ai ajouté : « J’ai des épisodes à répétition, et je sais que j’ai besoin d’une opération. S’il vous plaît, appelez mon cardiologue. »

Après lui avoir parlé, elle est venue m’annoncer qu’on allait me garder. En l’espace de quelques jours, j’ai passé mon angiographie et subi mon opération.

Comment s’est passé votre rétablissement?

Avant la chirurgie, j’ai fait des recherches : j’ai appris qu’on pratiquait parfois une petite incision – d’à peine 7 à 10 cm – au lieu d’une très longue, dont la cicatrice ressemble à une grosse fermeture à glissière. J’ai demandé à mon chirurgien s’il pouvait le faire, et il a accepté. Je lui en étais vraiment reconnaissante.

Durant l’opération, j’ai eu une hémorragie difficile à contrôler en raison de mon trouble préexistant : l’équipe médicale a dû me faire 12 ou 13 transfusions de sang. Après ma chirurgie, j’ai eu quelques complications, y compris une accumulation de liquide autour des poumons.

Malgré tout, ma nouvelle valve fonctionnait comme un charme, dès le départ.

J’ai suivi un excellent programme de réadaptation cardiaque au centre communautaire juif local (YM-YWHA). Il m’a donné la confiance dont j’avais besoin pour reprendre l’activité physique. Le programme m’a aidée à me remettre sur pied pendant ma convalescence de six mois.

Quand j’ai repris le travail, on a ajusté mes tâches pour faciliter mon retour progressif de six mois. Ça aussi, ça m’a beaucoup aidée.

Comment vous sentez-vous aujourd’hui?

D’après les résultats de mon échocardiogramme de suivi d’avril 2024, ma valve fonctionne toujours bien après 12 ans. J’ai quelques problèmes de santé, mais ils ne sont pas liés à ma valve.

J’ai été aussi soulagée d’apprendre que, malgré l’hérédité de la bicuspidie aortique, mes enfants n’ont pas cette malformation. Je vais m’assurer que mes petits-enfants se fassent aussi examiner.

Qu’aimeriez-vous que les gens sachent?

Je me sens quand même chanceuse. Je sais qu’un tel diagnostic peut être bouleversant. Prenez un ou deux jours pour digérer la nouvelle : c’est un processus. Après, n’hésitez pas à poser des questions. Faites des recherches, mais ne croyez pas que le Web détient toutes les réponses. Notez vos questions et posez-les à votre médecin.

Si vous avez besoin d’une chirurgie, c’est pour vous garder en vie : ça en vaut la peine.

Il est aussi important d’avoir une attitude positive et de vous entourer de gens qui vous appuient et vous font du bien. Lorsque j’ai accepté le fait d’avoir besoin d’une chirurgie, j’ai toujours essayé de rester positive. Je suis rentrée au bloc opératoire en me disant : « Je vais m’en sortir. Je ne suis pas inquiète. »

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« Vous pouvez sembler en parfaite santé, même avec ce problème latent. »

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